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À l’ère du numérique : et si l’utilité redevenait notre boussole ?

par Hortense Grardel

Introduction

Le numérique a transformé nos sociétés, mais à quel prix ? Entre désinformation massive générée par l’IA, sites web énergivores pour des fonctionnalités inutiles, et données personnelles stockées à l’autre bout du monde, le secteur semble avoir perdu de vue sa raison d’être : servir l’utilité collective.

En tant qu’agence web spécialisée en numérique responsable, cette question est centrale. Car face à ces excès, l’utilité, qu’elle soit sociale, environnementale, économique ou politique, pourrait bien être la clé pour réinventer un numérique plus responsable, sobre et maîtrisé.

Intelligences artificielles (IA) : entre désinformation et consommation excessive

L’intelligence artificielle génère aujourd’hui des contenus à une échelle inédite et une vitesse vertigineuse. Cependant, cette révolution fait face à deux enjeux majeurs :

  • La désinformation : Les IA ont démocratisé la création de contenus, mais elles ont aussi ouvert la porte à une crise sans précédent de la désinformation avec la diffusion d’informations non vérifiées, parfois erronées. Elles permettent également de produire des contenus trompeurs, comme des faux articles, ou des deepfakes audios, photos et vidéos hyperréalistes.
  • L’empreinte carbone : Une seule requête sur un modèle d’IA peut consommer 5 à 10 fois plus d’énergie qu’une recherche sur un moteur de recherche « classique » comme Google.

Mais les intelligences artificielles (IA) ne sont pas inutiles, bien au contraire ! Elles permettent de faciliter nos vies au quotidien et de simplifier l’accès à l’information pour tous.

Le problème provient plutôt de l’usage qui est fait de ces IA. En plus d’être utilisées massivement pour des requêtes plus ou moins pertinentes, le contenu qu’elles génèrent est peu remis en cause puisque 68 % des informations remontées sont considérées comme crédibles (source : étude Eskimoz).

Avoir une approche de numérique responsable n’induit pas de ne pas utiliser les IA, mais de raisonner leur utilisation pour qu’elles restent utiles. Elles doivent rester un levier d’efficacité, pas un outil de surproduction de contenus superflus ou trompeurs.

Éco-conception numérique : réduire la consommation énergétique en revenant à l’essentiel

Le numérique représente aujourd’hui 4 % des émissions mondiales de CO₂, soit plus que le transport aérien (source : ADEME). Cette tendance, en constante augmentation, s’explique principalement par l’utilisation croissante d’outils et services numériques au quotidien, qui proposent toujours plus de fonctionnalités et d’animations.

La multiplication de ces fonctionnalités sur les sites web et applications génère des sites qui sont toujours plus lourds, puisqu’un site internet moyen pèse aujourd’hui 2,5 Mo, contre 0,5 Mo il y a 10 ans (source : HTTP Archive). Et pourtant, l’ADEME souligne que seulement 10 à 20 % des données stockées sont réellement actives et utiles dans les entreprises.

En réponse à ce phénomène, l’éco-conception numérique vise à supprimer le superflu pour recentrer les services numériques sur ce qui est réellement utile. De plus, simplifier l’UI-UX et réduire les fonctionnalités ne signifie pas nuire à l’expérience utilisateur, loin de là ! L’éco-conception permet justement de l’améliorer grâce à des pages qui chargent plus vite et des contenus plus facilement et rapidement accessible.

Accessibilité : un numérique utile est un numérique pour tous

L’accessibilité numérique consiste à concevoir et adapter les services digitaux (sites web, application, …) pour qu’ils soient utilisables par toutes les personnes, quels que soient leur condition physique ou intellectuelle.

Pourquoi est-ce un réel enjeu ? Parce qu’en France, 12 millions de personnes sont en situation de handicap. Pourtant, seulement 4 % des sites web sont pleinement accessibles. De plus, exclure une partie de la population, c’est non seulement limiter la visibilité d’un service numérique, mais aussi se priver d’une opportunité économique en ne touchant pas l’ensemble du marché.

Intégrer une approche d’accessibilité basée sur le RGAA est donc primordiale pour concevoir un site internet ou une application qui soit efficace et utile à tous et pour tous.

La souveraineté numérique : reprendre le contrôle de nos données

Aujourd’hui, 92 % des données mondiales sont stockées aux États-Unis ou en Chine (source : Statista), une situation qui pose deux problématiques. D’une part, ces données sont soumises à des législations étrangères, comme le Cloud Act américain, qui compromettent leur confidentialité et leur sécurité. D’autre part, les data centers de ces deux pays sont parmi les plus énergivores au monde.

Cette situation interroge : quelle est l’utilité réelle d’une collecte de données aussi massive ? Leur exploitation reste souvent floue, leur pertinence douteuse, et leur stockage systématique affaiblit la souveraineté européenne, tout en exposant les utilisateurs à des risques.

Pour y remédier, il est essentiel de reprendre le contrôle en privilégiant des infrastructures locales, comme les hébergeurs européens conformes au RGPD, et en adoptant une approche plus sélective et transparente de la collecte de données. L’enjeu dépasse le simple cadre technique : c’est une question de résilience écologique, économique et politique.

Conclusion : le numérique doit redevenir un outil utile

Face aux déviances de l’IA, à la consommation énergétique excessive des sites web et à la perte de souveraineté des données, l’utilité doit redevenir un critère majeur dans chaque projet numérique.

Chez Digital.green, nous croyons que le numérique de demain se construit aujourd’hui, en plaçant l’utilité au cœur de chaque décision. Parce qu’un clic, une ligne de code ou une donnée collectée doivent avoir un sens : celui de nous rendre service, pas de nous encombrer.